Traduit d'Odysseas Elytis
L'ICONE
Singulier, le rocher, et pleines de respect
Circulent les houles dans les ténèbres. Les asphodèles
Les narcisses et autres produits
De l'imagination des morts vont contre brume et sommeils
J'avance d'instinct sans savoir quel jour
Exhale l'odorante noblesse du vieux bois
Ou de l'animal humilié. Et en vérité
Il doit avoir existé par ici, quelque part ; si vivement
Que l'aube se lève, je vous retrouve
Mes tourments sacrés maisons aux tuiles herbues parmi
les citronniers
Arcades, chambres où j'ai demeuré et fontaines à ciel ouvert
D'où l'ange a-t-il approché ? Qu'est-il resté ? Qui, désormais ?
J'arrive à demi-consumé par ce côté de la ville
Comme, par l'incendie de l'église, l'icône
Rougeur du feu et noirceur du démon
Qui dans la rosée du matin
tout-doux tout-doux se dissolvent
Eraillé et tout griffé, avec encore dessus les mots JE T'AIME
bien distincts
Le mur ! Et la rampe de l'escalier mais celle-là
Décolorée et polie par toutes les paumes légères qui l'ont
parcourue !
Accablé par l'âge, je gravis à nouveau mes années de jeunesse
Sachant où le vieux plancher va grincer, tandis
Que depuis son cadre tante Mélissine me surveillera,
Et s'il va pleuvoir demain
Peut-être revendiqué-je une chose qui de toujours m'appartient
Il se peut que ce soit simplement une place dans l'Avenir
Ce qui revient au même ; habit taillé dans les froids feux
Verts du cuivre et le cramoisi profond de la Vierge
Je reste debout la main droite sur le coeur
Derrière-moi deux ou trois chandeliers
La petite lucarne carrée par-dessus la tempête
L'Au-Delà et le Futur.